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Un cochon d’Inde de taille non négligeable, certes, qui gueulait, gueulait, pour nous avertir que nous étions cernés de rats toujours prêts à nous jouer un sale tour ; ce n’en est que plus vrai à l'heure actuelle. Plus ils sont gros, les rats, plus ils dévorent. Ils n’ont que le verbe « Manger » à la bouche. Et encore, « Manger » est un euphémisme. Ils se goinfrent, ils se gavent plutôt qu’ils ne mangent. Ayant la notion de partage en horreur, on ne donne rien sans rien chez eux. Les petits, en règle générale, recherchent la compagnie des gros dans le but d’instaurer une sorte de vie en symbiose, une très curieuse relation d’échange où la fausseté des sentiments rivalise avec la fausseté du dire. Comme Léo avait l’oreille musicienne (d’ailleurs la moindre note de violon, de violoncelle, de hautbois ou de harpe, dans cette chanson, est de sa main ‒ d’où le sens satirique du dernier couplet ), il avait l’avantage de flairer un rat qui l’abordait dès les premiers mots, qu’il soit à découvert ou masqué. Le plus difficile, c’était avec les rats femelles. Là il se faisait souvent avoir, car, pour approcher la justesse du dire, les rats femelles ont le trick d’insérer dans le corps du mensonge un petit bout de vérité.

Bien que le rat n’aime rien ni personne – sinon lui-même –, un cochon d’Inde peut éprouver de la compassion pour certains rats, en particulier ceux avec lesquels il sent qu’ils sont à deux doigts de muter cochon d’Inde. Mais, hélas, ça n’arrive jamais. Dans un monde où l’honnêteté ne rapporte rien sur le plan carrière ou pécuniaire, le rat considérera toujours le cochon d’Inde d’un sentimentalisme beaucoup trop sincère pour ne pas être ridicule.

En revanche, un cochon d’Inde peut devenir rat sans problème. Mutation que l’on observe de plus en plus en ces temps. Trahison ? Calcul ? Instinct grégaire ? Crainte de faire partie d’une minorité ? Les facteurs sont multiples.